2009 Des traitements anti VIH qui tuent
Lien possible entre Telzir et infarctus du myocarde, selon GSK et Santé Canada. L'AFSSAPS se tait, comme d'habitudeDans une alerte parue le 17 juillet sur son site, Santé Canada porte à la connaissance du public et des professionnels de santé une mise en garde faite par le laboratoire GSK, qui commercialise le Telzir (fosamprénavir), prescrit à des patients infectés par le HIV. Apparemment, une semaine après, l'agence française de sécurité sanitaire (AFSSAPS), chargée de la pharmacovigilance et de l'information sur les risques des médicaments, n'a pas (encore?) jugé bon d'avertir les patients français et leurs médecins. Les Européens sont "tenus dans l'ignorance" sur les risques des médicaments - cette (http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2008/07/30/medicaments-dangereux-les-europeens-tenus-dans-l-ignorance.html)affirmation d'un spécialiste américain reprise par la revue Prescrire se vérifie encore et encore...
llustration: cette page de GSK France http://www.gsk.fr/gsk/medicament/telzir.htm
En France, personne n'oblige GSK à en parler, donc la firme et l'AFSSAPS peuvent se taireL'AFSSAPS se tait, et pourtant, il ne s'agit pas d'une rumeur qui serait contestée par le laboratoire producteur, puisque c'est GSK lui-même qui donne l'alerte. Oui, certes, mais pas dans tous les pays... Les disparités s'expliquent par le fait - incroyable, mais vrai - que les firmes n'ont pas les mêmes obligations légales de transparence et d'information en Europe qu'aux Etats-Unis, comme l'a montré http://pharmacritique.20minutes-blogs.fr/archive/2008/07/21/l-europe-talonne-les-etats-unis-dans-la-promotion-irrespons.html cette enquête très édifiante de Consumers International. Elle confirme l'avertissement qu'on peut lire partout sur les sites étrangers des firmes publiant les résumés des caractéristiques du produit (notices détaillées) de tel médicament : attention, cette information est réservée aux personnes qui résident aux Etats-Unis (par exemple) et correspond à la réglementation existant dans ce pays. D'autres pays peuvent avoir des exigences différentes, ce qui explique pourquoi vous ne retrouverez pas les mêmes informations partout. Clair comme de l'eau de Roche.
Chez nous, aucune régulation digne de ce nom ne vient entraver la course à la maximisation des profits, aucun cadre législatif-juridique permettant d'exiger des informations ou de demander réparation n'existe. Et, en bonnes commerçantes, les pharmas ne donnent pas des informations que personne ne leur demande, surtout lorsqu'elles sont à ce point-là susceptibles de nuire au commerce... Il s'agit certes d'un lien possible entre le Telzir et les crises cardiaques, donc pas formellement démontré, mais une telle démonstration définitive est de toute façon quasiment impossible à faire. Cela dit,
pourquoi les Français n'auraient-ils pas droit à la même information, aux mêmes mises en garde, afin que les médecins puissent mettre en place un suivi adéquat des patients, ajuster les traitements en fonction du degré de risque de chaque personne et prendre des mesures de précaution ?Voici l'information canadienne: http://www.hc-sc.gc.ca/dhp-mps/medeff/advisories-avis/prof/_2009/telzir_hpc-cps-fra.php
"Renseignements importants en matière d'innocuité approuvés par Santé Canada concernant TELZIR (fosamprénavir)"
"GlaxoSmithKline, en collaboration avec Santé Canada, tient à vous communiquer des renseignements importants sur l'innocuité concernant un lien possible entre l'exposition au TELZIR® (fosamprénavir) chez les patients infectés par le VIH et la survenue d'infarctus du myocarde.
Le fosamprénavir est un inhibiteur de la protéase (IP) utilisé en association avec une faible dose de ritonavir et d'autres antirétroviraux dans le traitement de l'infection par le VIH-1.
•Une étude cas-témoins issue d'une cohorte dérivée d'une base de données d'hôpitaux français spécialisée sur le VIH (French Hospital Database on HIV) a fait état d'une association entre l'exposition au fosamprénavir et un risque accru d'infarctus du myocarde (rapport de cotes (RC) de 1,55 par année additionnelle d'exposition; intervalle de confiance (IC) à 95 %, 1,20-1,99)1.
•Ce phénomène pourrait être lié à la
propension de cette classe de médicaments à élever les taux de lipides sanguins. Les taux de triglycérides et de cholestérol devraient donc être mesurés avant d'entreprendre un traitement par le fosamprénavir, et à intervalles réguliers par la suite. Une prise en charge clinique appropriée des dyslipidémies devrait être amorcée, le cas échéant.
•Il convient aussi de
surveiller les autres facteurs de risque modifiables de maladies cardiovasculaires (p. ex. hypertension, diabète et tabagisme) chez les patients infectés par le VIH et de
les prendre en charge comme il se doit sur le plan clinique.Des données récentes présentées à la 16e Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI 2009) suggèrent l'existence d'un lien possible entre le fosamprénavir et l'infarctus du myocarde chez des adultes infectés par le VIH. L'étude cas-témoins issue d'une cohorte a fait état d'un risque accru d'infarctus du myocarde en relation avec l'exposition cumulative au fosamprénavir (RC de 1,55 par année additionnelle d'exposition; IC à 95 %, 1,20-1,99)1. L'étude Data Collection on Adverse Events of Anti-HIV Drugs (DAD), toujours en cours, a déjà fait état d'une association possible entre la classe des IP et l'infarctus du myocarde2.
Chez les patients infectés par le VIH, la suppression de la réplication du virus par le traitement antirétroviral est primordiale. Dans le cadre du suivi de leurs patients, les médecins devraient surveiller le risque cardiovasculaire et chercher à corriger les facteurs de risque modifiables. Les traitements antirétroviraux d'association entraînent une redistribution du tissu adipeux (lipodystrophie) chez les patients infectés par le VIH. L'examen clinique devrait comprendre la recherche de signes physiques de redistribution des graisses. L'infection par le VIH en soi a été associée à des dyslipidémies et à la cardiopathie ischémique.
GSK travaillera de concert avec Santé Canada sur ce sujet afin d'ajouter de nouveaux renseignements sur l'innocuité dans la monographie du produit au Canada.
La gestion des effets indésirables liés à un produit de santé commercialisé dépend de leur déclaration par les professionnels de la santé et les consommateurs.
Les taux de déclaration calculés à partir des effets indésirables signalés de façon spontanée après commercialisation des produits de santé sous-estiment généralement les risques associés aux traitements par ces produits de santé. Tout cas d'infarctus du myocarde ou tout effet indésirable grave ou inattendu survenant chez des patients prenant TELZIR® en comprimés ou en suspension orale doivent être signalés à GlaxoSmithKline ou à Santé Canada aux adresses suivantes (...)".
Crises cardiaques et antirétroviraux : soupçons depuis l’étude DAD
Act Up avait rendu compte au mois de mars des soupçons d'effets indésirables cardiovasculaires pesant sur plusieurs médicaments antirétroviraux: voir l'article "ARV et risque cardiovasculaire" http://www.actupparis.org/spip.php?article3676. Il y est question de l’étude l'étude Data Collection on Adverse Events of Anti-HIV Drugs (DAD), mentionnée plus haut par GSK et Santé Canada.
Le signalement des effets indésirables est une obligation légale, et pourtant...
Santé Canada demande le signalement de tout effet secondaire grave ou inattendu. Encore une occasion de rappeler ce qui est dit souvent dans les pages de Pharmacritique, à savoir que la notification de tout "effet indésirable susceptible d'être dû à un médicament ou produit de santé" est une obligation légale, même pour les professionnels de santé français, qui ont pourtant bien moins de responsabilité pour leurs actes, par rapport à ceux Nord-américains, par exemple.
L'article R.5144.19 du Code de la Santé publique dit ceci (extrait tiré du formulaire de notification):
"Tout médecin, chirurgien dentiste ou sage-femme ayant constaté un effet indésirable grave ou inattendu susceptible d'être dû à un médicament ou produit mentionné à l'article R.5144-1, qu'il l'ait ou non prescrit, doit en faire la déclaration immédiate au centre régional de pharmacovigilance. De même, tout pharmacien ayant eu connaissance d'un effet indésirable grave ou inattendu susceptible d'être dû à un médicament ou produit mentionné à l'article R.5144-1 qu'il a délivré doit également le déclarer aussitôt au centre régional de pharmacovigilance. Tout membre d'une profession de santé ayant fait la même constatation peut également en informer le centre régional de pharmacovigilance. (...)
Le rôle des professionnels de santé en matière de pharmacovigilance
1. Notifier au centre de pharmacovigilance du lieu d'exercice du praticien déclarant, le plus rapidement possible :
•toute présomption d'effets indésirables graves ou inattendus, en rapport avec l'utilisation d'un ou plusieurs médicaments,
•toute observation d'effet indésirable lié à un mésusage,
•tout autre effet qu'il juge pertinent de déclarer.
2. Répondre aux demandes du destinataire de la notification en confirmant et complétant celle-ci par écrit, notamment si elle a été transmise oralement ou par téléphone, afin de documenter l'observation initiale.
3. Informer les patients en application de la loi du 6 janvier 1978 des déclarations les concernant adressées au centre de pharmacovigilance et à l'Agence du Médicament, et des modalités d'exercice de leur droit d'accès.
4. Conserver les documents concernant l'effet indésirable présumé afin de permettre, en cas de nécessité, de compléter les informations précédemment transmises.
5. Coopérer avec les structures de pharmacovigilance, notamment dans le cadre d'enquêtes particulières.
6.
Se tenir informé et tenir compte dans sa pratique professionnelle des données de tolérance des médicaments qu'il prescrit, dispense ou administre. »
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