[Date: 2007-08-01]
Appel à un programme de recherche global sur le VIH/sidaL'Europe doit adopter de concert une réponse en termes de recherche au VIH/sida qui soit appropriée à l'ampleur du problème. Tel est le principal message d'un rapport sur la santé publié par le groupe EAGLES (Action européenne sur les sciences du vivant à l'échelle mondiale).
Le VIH/sida est l'une des pandémies les plus destructives attestées dans l'histoire mondiale. Environ 39 millions de personnes ont été infectées par le VIH et 17 millions y ont succombé, en majorité dans des pays en développement. D'après les statistiques des Nations unies, aucun signe de recul du sida ne peut en outre être constaté et près de cinq millions de nouvelles infections sont recensées chaque année.
Cette maladie constitue dès lors un enjeu substantiel pour la santé dans le monde. «À l'échelle mondiale, le volume de la recherche sur le VIH/sida est toutefois nettement disproportionné au regard des problèmes sanitaires, scientifiques, technologiques, sociaux et politiques sans précédents inhérents à cette maladie», déclare Ismail Serageldin, président d'EAGLES, un projet financé par l'UE qui vise à renforcer les réactions européennes aux défis mondiaux posés par les maladies liées à la pauvreté dans les pays en développement.
Le rapport épingle la fragmentation excessive des réponses apportées jusqu'à présent à la pandémie dans la recherche européenne. Il souligne en outre un manque de connaissances parmi les politiques et les autres acteurs concernés en Europe quant aux délais et aux ressources nécessaires, par exemple, pour amener un nouveau concept d'un laboratoire universitaire à un essai clinique. Même les conseils de recherche et les associations caritatives de grande envergure hésitent face au montant des subventions requises pour couvrir ces activités.
La Commission européenne elle-même se démène dans des contraintes financières considérables. «Sur le plan politique, elle est poussée par les États membres à soutenir des activités diversifiées et dynamiques dans le champ complet de la recherche sur le VIH/sida, mais elle ne reçoit pas de ressources suffisantes pour s'acquitter de cette tâche», commente le rapport.
Un exemple de contraintes financières peut être observé dans le partenariat des pays européens et en développement sur les essais cliniques (EDCTP), qui finance un renforcement des capacités et des essais cliniques. Au titre du sixième programme-cadre (6e PC), la Commission européenne a alloué initialement 200 millions d'euros au programme EDCTP, auxquels devaient s'ajouter 200 millions d'euros issus des budgets nationaux et 200 millions d'euros versés par le secteur privé. À la suite de divers problèmes d'administration et de gestion, 40 millions d'euros seulement ont toutefois été débloqués à ce jour à partir du budget européen, et 37 millions à peine du côté des États membres.
Le rapport du projet formule donc quelques propositions pour la définition de la réaction européenne à la pandémie en termes de recherche. Il préconise notamment la création d'un programme de recherche européen sur le VIH pour les pays en développement, qui serait financé partiellement par le budget de la Communauté européenne et des États membres et dirigé par une organisation calquée sur le Conseil européen de la recherche (CER).
«Avec son histoire unique et ses responsabilités mondiales, ainsi que son économie puissante, l'Europe se doit de mettre sur pied un tel programme de recherche global, et ce à une échelle qui soit à la hauteur du défi à relever», affirme le docteur Serageldin.
Ce programme serait chargé de distribuer d'importantes subventions pour la recherche fondamentale et appliquée sur la base de critères d'excellence scientifique. Les institutions tant publiques que privées pourraient bénéficier de ces subventions à condition qu'elles publient tous leurs résultats. Le programme aurait également la possibilité de former des partenariats public-privé axés sur la recherche traductionnelle, les systèmes de production et les essais cliniques.
Les auteurs du rapport insistent sur la nécessité particulière d'investir davantage dans la recherche sur les vaccins et les microbiocides. «S'il existait un vaccin efficace qui puisse être administré aux personnes les plus à risque, ou une mesure préventive simple et efficace que les femmes puissent appliquer avant un rapport sexuel, cela pourrait changer complètement la donne!», écrivent-ils.
Le défi reste toutefois immense et requiert un engagement à une échelle industrielle, à la fois de la part de la Commission européenne et des États membres, pour transformer les idées en produits fonctionnels. «En résumé, cela implique de raisonner dans un esprit industriel, comme une entreprise qui cherche à dégager un bénéfice, mais en l'occurrence, en cherchant à sauver des vies», peut-on lire dans le rapport. Il est en outre recommandé que l'Europe crée un instrument de financement des projets d'une profondeur et d'une durée suffisantes pour qu'un vaccin puisse être entièrement développé et soumis à un examen par d'autres scientifiques.
Une deuxième phase s'imposerait ensuite pour faire avancer le candidat le plus prometteur. Ces efforts devraient être associés sous l'égide de l'initiative Global HIV Vaccine Enterprise afin de hiérarchiser les meilleurs candidats. D'autre part, des incitations politiques pourraient être offertes au secteur privé pour rechercher un vaccin contre le sida, et des incitations pourraient également servir à intensifier la recherche sur de nouveaux médicaments anti-rétroviraux.