Dans le sillage de travaux antérieurs suggérant une association significative entre la toxoplasmose et certaines problématiques psychiatriques (notamment la schizophrénie[1]), une étude prospective a été réalisée sur une cohorte de 45 788 femmes nées au Danemark et ayant donné naissance à un enfant entre 1992 et 1995. Ces mères ont été suivies jusqu’en 2006 pour déterminer dans quelle mesure une infection par le protozoaire Toxoplasma gondii peut accroître le risque de comportement autodestructeur (self-directed violence), tentative de suicide ou suicide accompli, et si cette élévation du risque dépend elle-même du niveau d’anticorps (IgG spécifiques) contre le parasite.

Les chercheurs constatent que les mères infectées par l’agent de la toxoplasmose ont un « risque accru de violence auto-infligée », comparativement à celles non infectées (Odds Ratio [OR] = 1,53 ; intervalle de confiance à 95 % [IC95] : 1,27–1,85) et que ce risque relatif « semble augmenter avec le niveau d’anticorps IgG. » Pour les tentatives de suicide violentes, le risque est presque multiplié par 2 (OR = 1,81 ; IC95 : 1,13–2,84), et pratiquement doublé pour les suicides « réussis » (OR = 2,05 ; IC 95 : 0,78–5,20). Une association similaire est retrouvée pour les comportements d’auto-agressivité récurrents, avec un risque amplifié là encore de façon significative (OR = 1,54 ; IC95 : 0,98–2,39).

En conclusion, si le suicide reste bien entendu « l’issue tragique d’une vulnérabilité mentale multifactorielle », l’infection par T. gondii semble constituer un authentique facteur de risque supplémentaire chez les femmes avec des antécédents d’auto-agressivité, et sa recherche systématique pourrait donc être proposée, dans un contexte de violence auto-infligée. Et réciproquement, une surveillance psychiatrique plus étroite ne paraît pas superflue, en cas de maternité chez une femme avec des antécédents connus d’infection par T. gondii.


Dr Alain C.

Pedersen MG coll.: Toxoplasma gondii infection and self-directed violence in mothers. Arch Gen Psychiatry 2012: 69: 1123–1130.

[1] Pedersen MG et coll.: Toxoplasma infection and later development of schizophrenia in mothers. Am J Psychiatry 2011: 168: 814–821.