Impact de l´allaitement artificiel sur la mortalité et la morbidité d´enfants nés de mères infectées par le VIH

Dr Karine Lacombe

Dans les pays du Sud, l´allaitement maternel est fortement déconseillé aux femmes infectées par le VIH à cause du risque élevé de transmission du virus (de l´ordre de 9%, responsable de 40% des cas d´infections de nouveaux-nés). Cependant, en absence d´accompagnement lors de l´allaitement artificiel, les enfants sont exposés à un risque élevé de décès par maladies infectieuses, en particulier lors de la petite enfance. L´étude de cohorte Ditrame Plus, menée sous l´égide de l´ANRS, avait pour objectif de proposer à 580 femmes infectées par le VIH et ayant bénéficié d´une prévention de la transmission materno-fœtale du VIH par antirétroviraux, une prise en charge postpartum de l´alimentation des nourrissons soit par allaitement artificiel total, soit par allaitement maternel pendant 4 mois, puis allaitement artificiel. Le lait était fourni, ainsi que des conseils diététiques et un suivi médical des enfants. Au total, 557 enfants ont pu être suivis, dont 295 nourris par allaitement artificiel exclusif. Deux ans après leur naissance, 75 enfants sont morts ou ont été hospitalisés (39 dans le groupe d´allaitement artificiel et 36 dans l´autre groupe), tandis que 37% des enfants nourris au lait artificiel versus 34% des enfants nourris initialement au sein n´ont présenté aucun problème médical grave. En comparaison avec la cohorte historique des enfants suivis dans le premier essai Ditrame, dans lequel les enfants nés de mères infectés par le VIH avaient bénéficié d´un allaitement exclusivement maternel, la probabilité de survie des enfants ayant reçu du lait artificiel est proche de 96%, versus 95% dans la cohorte historique. Il semble donc qu´un accompagnement nutritionnel des femmes infectées par le VIH (conseils, suivi médical, accès gratuit au lait et à l´eau propre) puisse permettre de recourir à l´allaitement artificiel dans les pays du Sud, sans préjudice médical pour les enfants.