sida, sidaventure, vih, vhc, info sida, forum sida, information sida, prevention sida, forum vih, t'chat sida, tchat sida, femmes sidaBruno Spire est président d'Aides depuis juin 2007. (AFP)
INTERVIEW Un homme vient d'être condamné à deux ans de prison ferme pour avoir transmis le sida en connaissance de cause. Mais pour le président d'Aides, «pénaliser n'est pas la solution».
Lundi, le tribunal correctionnel de Marseille a condamné un homme de 41 ans à trois ans de prison, dont un avec sursis. Il y a huit ans, la plaignante avait été contaminée par cet homme qu'elle aimait, et avec lequel elle vivait depuis neuf mois. Lui se savait séropositif et l'avait tu. Poursuivi pour «administration volontaire d'une substance nuisible ayant entraînée une incapacité ou une infirmité permanente», il avait été traité de «salaud» par le procureur, qui avait requis la peine prononcée.
Cette affaire soulève une nouvelle fois la délicate question de la pénalisation de la transmission du virus du sida. Un débat relancé à Strasbourg en 2004, avec la condamnation a six ans ferme d'un homme qui se savait porteur du virus et qui l'avait sciemment transmis à deux jeunes femmes. L'association Femmes Positives lutte pour que cela soit reconnu comme une «violence conjugale, comme un viol psycologique et biologique», comme une «condamnation à mort sans votre consentement».
Les acteurs de la lutte contre le sida s'inquiètent en revanche d'une généralisation de ce type de procès. Explications avec Bruno Spire, président de l'association Aides.
lefigaro.fr : Vous êtes contre la pénalisation de la transmission du sida. Est-ce à dire que vous comprenez la situation des personnes qui contaminent leur conjoint sans leur dire qu'elles sont séropositives ?
Bruno Spire : Bien sûr que non. Mais attention, il faut tout d'abord rappeler que ces cas sont très rares : ils concernent moins de 1% des séropositifs. Heureusement, la majorité des personnes qui sont en couple se protègent !
Notre position, effectivement, est très claire : comme la très grande majorité des associations de lutte contre le sida, nous ne pensons pas que la pénalisation soit une solution.
Pourquoi cette position radicale ?
Parce que nous craignons les conséquences de cette tendance : si la répression se concentre sur les séropositifs, il y a fort à parier que les gens n'iront plus se faire dépister. Les personnes psychologiquement faibles préfèreront sans doute vivre dans l'ignorance plutôt que de se savoir contaminatrices, et donc de potentiellement aller en prison. Et c'est là le vrai danger : ceux qui ignorent leur état sont plus dangereux pour les autres que ceux qui sont traités.
Nous estimons par ailleurs que dans le cadre d'une relation sexuelle, les responsabilités sont partagées.
Si on ne punit pas ce genre d'attitude, quelle solution préconisez-vous ?
Que les choses soient bien claires : moralement, je comprends que des personnes qui se sentent trahies en attaquent d'autres en justice. La douleur, c'est quelque chose qui s'entend. Ce qui me choque, c'est que cela se fasse au pénal, que ce soit finalement la société qui accuse et stigmatise les séropositifs. On a l'air des méchants car l'émotion est du côté des victimes, mais attention aux raccourcis.
S'il y a un coupable avant tout, c'est le virus. Aujourd'hui encore, le VIH est une maladie taboue qui fait perdre son travail, qui change le regard des autres. Il faut que collectivement, on progresse sur ce terrain. Pour que les gens disent qu'ils sont séropositifs, il faut qu'un climat de confiance s'installe. Or pour l'instant, les gens ont toujours peur.
Dim 29 Juin 2008 - 21:29 par sidaventure