Expression libre sur la santé et tous les lobbies et conflits d'intérêts qui la mettent en danger. Les rapports entre industrie pharmaceutique, médecine et usagers sont sous la loupe critique...
13.03.2011
Haute Autorité de Santé: Présidence de l’UMP Jean-Luc Harousseau, qui a perçu 205 482 euros des laboratoires depuis 2008…
Sur le site de la HAS (Haute autorité de santé) on apprend les nouvelles nominations faites par Nicolas Sarkozy au mois de janvier, pour faire semblant de changer le système d’évaluation du médicament après le désastre du Médiator (benfluorex) de Servier, qui n'est qu'un épiphénomène d'une filière médicament biaisée de part en part :
« Le Pr Jean-Luc Harousseau a été nommé président du Collège de la Haute Autorité de Santé (HAS) par le Président de la République fin janvier. Ce dernier a également procédé à la nomination d’Alain Cordier et du Dr Jean-François Thébaut en tant que membres du Collège et a renouvelé le mandat du Dr Cédric Grouchka. Ces quatre personnalités complètent, avec Jean-Paul Guérin, président de la Commission certification des établissements de santé et les Prs Gilles Bouvenot, président de la Commission de la transparence, Jean-Michel Dubernard, président de la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé et Lise Rochaix, présidente de la Commission évaluation économique et de santé publique, le Collège de la HAS. »
« [A]lors que le paysage sanitaire connaît des mutations importantes », selon la HAS, on ne constate aucune mutation dans ces changements : plus ça change, plus c’est la même chose… Le Pr Jean-Luc Harousseau, hématologue, ancien président UMP du conseil régional des Pays de la Loire (photo du site HAS), inaugure sa présidence par des discours de langue de bois - et par un mensonge : dans sa déclaration d’intérêts du 31 janvier 2011, il dit n’avoir rien à déclarer, aucun lien.
Or le 21 février, il adresse un courrier à Muguette Dini, la présidente de la Commission des affaires sociales au Sénat, et un autre à Pierre Méhaignerie, président de la même Commission à l'Assemblée nationale, dans lesquels il affirme avoir tardé à répondre à la demande que les deux élus avaient formulé lors de son audition le 19 janvier parce que « le recueil des données a été plus long que prévu ». Il détaille « les liens d’intérêts » qu’il a « entretenu pendant les trois ans avant [s]a nomination » et affirme avoir cessé tout cela dès qu’il est devenu président de la HAS. Comme si on pouvait, d’un coup de baguette magique effacer ces liens financiers mais aussi personnels, les sommes d’argent et tous les privilèges…
68.456 euros en 2008 (de 16 laboratoires pharmaceutiques : Amgen, Cyclacel, Elios, Genzyme, Innovex, International Myeloma Foundation, Ipsen, Janssen Cilag, Kobe, Kiowa Hakko Bio, MSD [Merck], Pharmamed, Pharmion, Proteolis, Quintiles, Schering Plough)
85.724 euros en 2009 (de 12 compagnies pharmaceutiques : Amgen, BioInvent, BMS [Bristol Myers Squibb], Celgene, Janssen Cilag, Kyowa, Millenium, Mundi Pharma, Novartis, Novus Pharma, Otsuka, Proteolix)
51.662 euros en 2010 (de 10 firmes : Amgen, BMS, Celgene, Chugai, Janssen Cilag, Millenium, Novartis, Onyx, Proteolix Onyx, Seattle Genetics).
Cela fait un total de 205 482 euros rien qu’en honoraires personnels, sachant que le montant indiqué est celui qu’il a encaissé, donc « après paiement des taxes : TVA et URSSAF »… La déclaration (contenue dans les courriers) vaut le détour, car les conflits d’intérêts ne s’arrêtent pas à ces « honoraires ». Si l'on compte aussi les sommes perçues à titre institutionnel - et ce sont des conflits d'intérêts, même dans la compréhension très soft à la française -, le montant avoisine les 12 millions d'euros...
Parmi les prestations personnelles ainsi rémunérées figurent des conférences lors de réunions de formation médicale continue, financées à 98% par les firmes et qui sont rien d’autre que des supports publicitaires plus ou moins directs (voir ces notes)… Décidément, Jean-Luc Harousseau est un parfait exemple de leader d’opinion (key opinion leader, voir le dossier traduit du British Medical Journal), prêt à aller désinformer ses confrères médecins en vantant les mérites des médicaments des firmes qui le paient… Sans parler de sa « participation » à des « conseils scientifiques » de certains laboratoires, qui est un lien majeur avec la réussite de la stratégie d’un laboratoire et dont on ne se défait pas du jour au lendemain…
L’Express a publié une brève qui parle de cela sous le titre « La tardive transparence de la HAS ».
Elena Pasca
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