Transmission du VIH du soignant vers le soigné Seuls quatre cas de transmission du VIH du soignant vers le soigné ont été répertoriés dans le monde, un risque trop faible pour justifier le dépistage systématique des patients ou l'exclusion de soignants séropositifs, a considéré le Dr Jade Ghosn, de l'hôpital Bicêtre (AP-HP, Le Kremlin-Bicêtre, Val-de-Marne), lors d'une conférence organisée mardi par la Mutuelle nationale des hospitaliers (MNH).
Selon la littérature, "seuls quatre cas de contamination du virus du sida du soignant vers le soigné ont été répertoriés à travers le monde", a indiqué Jade Ghosn lors de cette rencontre organisée dans le cadre des 20 ans de la journée mondiale de lutte contre le sida, qui se tiendra lundi 1er décembre.
Il s'agit d'un dentiste en Floride, qui a contaminé six de ses patients en 1991, de deux soignants d'hôpitaux franciliens (un chirurgien orthopédiste à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines) et une infirmière à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis)) qui ont chacun contaminé une patiente, et d'un obstétricien espagnol qui a transmis le virus à une patiente alors qu'il s'était piqué lors d'une césarienne.
Selon le rapport Yeni de 2008, un cinquième cas aurait été rapporté, mais il n'a pas été publié dans la littérature, note-t-on.
Le plus fréquemment, cette exposition du patient est consécutive à une blessure du soignant avec le matériel de soin utilisé et à un nouveau contact de ce matériel avec les tissus du patient. "Dans les quatre cas de contamination, les praticiens ignoraient leur statut sérologique et avaient par conséquent une charge virale élevée", a précisé le Dr Ghosn.
Les pratiques à risque de transmission du soignant au soigné sont essentiellement la chirurgie profonde, les interventions prolongées mais aussi les accidents minimes d'exposition au sang, non remarqués par les soignants.
Le risque de transmission du VIH du soignant vers le soigné, calculé en considérant la probabilité de blessure d'un chirurgien, celle du contact d'un instrument souillé et celle de la transmission du VIH après une exposition au sang, est comprise entre 0,0024% et 0,00024%, soit une transmission pour 42.000 à 420.000 interventions pratiquées par un chirurgien VIH+, selon une estimation des Centers for Disease Control and Prevention (CDC).
Parmi les 75.000 soignants pratiquant des gestes invasifs en France, 30 à 350 seraient infectés de façon chronique par le virus de l'hépatite B (VHB), 300 à 3.500 par celui de l'hépatite C (VHC) et 37 à 370 par le VIH, selon un rapport de 2000 du Groupe d'étude sur le risque d'exposition des soignants (Geres).
Sur les 22.000 chirurgiens qui pratiquent des gestes invasifs, 10 à 90 seraient infectés par le VHB, 80 à 800 par le VHC et 11 à 110 par le VIH.
DES RECOMMANDATIONS DES CDC EN 1991
Afin de prévenir la contamination du soignant au soigné, les CDC ont émis en 1991, à la suite des cas de transmission par le dentiste de Floride, des recommandations actuellement appliquées de manière universelle.
Il est notamment recommandé d'identifier les procédures à risque d'exposition et il est demandé au soignant de connaître son statut sérologique, sans que le dépistage ne soit pour autant obligatoire. En cas de séropositivité, il est recommandé au soignant de solliciter l'avis d'un groupe d'experts afin de définir dans quelles limites il peut pratiquer sa profession.
En France, l'avis du Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHPF, devenu le Haut conseil de santé publique) de juin 2005 indique que les soignants infectés par le VIH ou le VHC peuvent pratiquer des actes invasifs à condition de présenter un état clinique satisfaisant ainsi qu'une charge virale indétectable depuis au moins trois mois.
"Le seul critère de séropositivité du soignant ne peut justifier son exclusion des soins", rappelle Jade Ghosn.
En ce qui concerne la séroconversion de professionnels de santé après exposition à risque avec un patient VIH+, l'Institut de veille sanitaire (InVS) a rapporté un total de 14 cas de contaminations avérés par le VIH et 34 infections présumées, entre 1993 et 2005.
Parmi les 14 cas avérés, douze ont concerné des infirmières. La dernière séroconversion est survenue en 2004 chez un pompier secouriste à la suite de projection de sang dans les yeux lors d'une prise en charge d'un patient séropositif.